jeudi 29 novembre 2012

Non au débat qui n'en est pas un...

Solidaires de Sortir du Nucléaire (civil et militaire), nous appelons non à faire silence mais à exprimer notre volonté d'aller vers les seules "énergie d'avenir" qui se passeront et de pétrole et de nucléaire, notamment grâce à la sobriété énergétique, à la fin des gaspillages électriques et à l'isolation généralisée.

 

 

Communiqué de presse  - 29 novembre 2012

Débat sur l'énergie : un écran de fumée pour occulter la politique du fait accompli

Aujourd’hui s’ouvre le « grand débat sur l’énergie » promis par François Hollande. Le Réseau "Sortir du nucléaire", invité en dernière minute à participer, a décliné la proposition et rappelle ses doutes très importants sur un processus qui semble uniquement destiné à entériner la politique gouvernementale.




Un processus-caution pour des décisions déjà prises
Contacté en dernière minute, sans doute pour occuper les chaises laissées vides par le départ de Greenpeace et des Amis de la Terre, le Réseau "Sortir du nucléaire" a refusé de servir de caution à un processus opaque, qui a tout d’une usine à gaz aux règles du jeu insondables. On est très loin d’un vrai débat démocratique et transparent sur l’énergie tel que les choix énergétiques le mériteraient.
Depuis plusieurs mois, le Réseau "Sortir du nucléaire" a exprimé ses doutes sur ce processus. Quel sens a ce "débat" si les décisions engageantes pour l’avenir énergétique sont adoptées ailleurs ? En six mois, le gouvernement a ainsi, sans concertation, appelé à accélérer les travaux de la mine d’uranium d’Imouraren au Niger ; soutenu fortement le projet de réacteur « de 4ème génération » Astrid ; réaffirmé le choix de la production et de l'utilisation de combustible MOX ; confirmé l’exportation de la technologie nucléaire ; signé le décret de création d’ITER…
Quel sens a ce débat si plusieurs membres du gouvernement ont une opinion tranchée sur le nucléaire, « énergie d’avenir » dont la France aurait « durablement besoin » ? Si Anne Lauvergeon, personnification même de l’industrie nucléaire, siège au comité de pilotage du débat ?


Réduction de la part du nucléaire : l’impossible équation
Le débat est censé étudier, entre autres, la « réduction de la part du nucléaire dans le mix électrique ». De quelle réduction peut-on parler si l’EPR de Flamanville doit être mis en service, et que même la fermeture de Fessenheim en 2016 ne peut être tenue pour acquise, le gouvernement n’ayant apporté aucun démenti aux voix qui remettaient en question l’arrêt de la centrale ?
Y a-t-il une vraie volonté du gouvernement de réaliser cette réduction, Arnaud Montebourg ayant déclaré "irréaliste de vouloir diminuer le nucléaire et le pétrole, tout en trouvant de l’argent pour financer les renouvelables" ?
Tout laisse à penser que ce débat est surtout destiné à entériner la protection de l’industrie nucléaire et à couper court aux projets de fermeture de centrales. On est bien loin d’une véritable "transition énerg’éthique" qui passerait par une réelle remise en question de notre production et de notre consommation d’énergie !

Il ne peut y avoir de débat sans respect de la société civile
Enfin, peut-il y avoir un vrai débat si la société civile n’est pas respectée ? À ce jour, Delphine Batho n’a apporté aucune réponse aux sollicitations des associations sur la fermeture de Fessenheim, y compris à la lettre ouverte que nous lui avons envoyé le 22 novembre. Surtout, comment peut-il y avoir un débat serein alors que les opposants aux grands projets imposés ne récoltent que la répression policière ?


Pour le Réseau "Sortir du nucléaire", ce n’est pas ce simulacre de démocratie qui permettra d’engager enfin la transition indispensable vers des énergies propres, sûres et créatrices d’emplois. Pour permettre aux citoyens de reprendre en main leur avenir, le Réseau "Sortir du nucléaire" donne rendez-vous le samedi 9 mars 2013 à Paris, pour une grande chaîne humaine qui encerclera les lieux de pouvoir.

Plus d’informations bientôt sur www.chainehumaine.org

dimanche 25 novembre 2012

Il n'est pas interdit d'avoir peur



Le Grand Nord souillé pour des siècles
par des déchets nucléaires

Pierre Le Hir

Source : www.lemonde.fr, le 22.11.2012

http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/11/22/le-grand-nord-souille-pour-des-siecles-par-des-dechets-nucleaires_1794588_3244.html
 
Fragilisé par le réchauffement, la pêche industrielle et le tourisme polaire, convoité pour les giseme
nts de pétrole, de gaz et de minerais que recèle son sous-sol, déchiré par les nouvelles routes maritimes que va ouvrir la fonte des glaces, le Grand Nord, ce territoire précieux et vulnérable, porte aussi les stigmates de multiples pollutions. La contamination radioactive est l'une des plus préoccupantes. C'est ce que fait apparaître l'inventaire – le premier du genre – qu'a entrepris de dresser l'association de protection de l'environnement Robin des Bois.



En 2009, l'ONG française avait déjà répertorié 2 750 sites pollués par des produits chimiques. Cette fois, elle s'est attachée à des atteintes à l'environnement parfois plus diffuses, mais aussi plus durables. Deux années de travail ont été nécessaires pour collecter, auprès de scientifiques, d'associations environnementales et de services gouvernementaux, des données non exhaustives, surtout lorsqu'elles relèvent du domaine militaire. L'inventaire devrait être
achevé au 1er semestre 2013, mais la très sérieuse revue Contrôle de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), en a déjà accueilli, dans son numéro de novembre, les premiers éléments.


"Nous avons voulu avoir une vision circumpolaire de tous les
sites pollués", explique Jacky Bonnemains, président de Robin des Bois. L'océan Arctique est un gigantesque vivier de poissons pour les populations indigènes qui s'en nourrissent et dont la santé est au premier chef menacée, mais aussi pour la planète, à laquelle il fournit, avec les eaux subarctiques, de 20 % à 30 % de ses ressources alimentaires marines." Ce n'est pas le seul danger. La fonte de la banquise polaire et le dégel du permafrost, poursuit-il, vont "remobiliser des substances radioactives" qui, jusqu'alors prisonnières des glaces, risquent de se disséminer dans les écosystèmes.




HÉRITAGE DE LA GUERRE FROIDE
L'ONG a identifié, au-delà du cercle polaire arctique – ou, dans quelques cas, un peu plus au sud, les courants atmosphériques et marins poussant les dépôts vers le nord –, quelque 90 sites marqués par la radioactivité émise par des activités industrielles et militaires. La Russie en concentre plus de la moitié (50), notamment sur la péninsule de Kola et l'archipel de Nouvelle-Zemble. Les autres se répartissent entre la Norvège (25 dont 19 sur l'archipel de Svalbard), l'Alaska (8), le Canada (3), la Suède (3) et le Groenland (2). La Finlande n'en compte aucun et l'Islande n'a pas été
étudiée.


"La pollution radioactive de l'Arctique ne vient passeulement, comme on le pense parfois, de pays éloignés, par exemple des usines de retraitement de La Hague [Manche] ou de Sellafield [Grande-Bretagne], dont les rejets, transportés par les courants, peuvent se concentrer dans certaines zones", commente Miriam Potter, chargée de mission au sein de l'association. Elle est issue, en grande partie, d'activités menées sur place." Bien souvent, il s'agit d'un héritage de la guerre froide. Sur l'archipel de Nouvelle-Zemble, les Soviétiques ont procédé, entre 1955 et 1990, à 138 essais nucléaires aériens, terrestres ou sous-marins, faisant notamment exploser, le 30 octobre 1961, la "Tsar Bomba", la plus puissante bombe à hydrogène de l'histoire (50 mégatonnes). L'océan servant à l'époque d'exutoire, ils ont sabordé au large de la même péninsule, en 1982, le sous-marin nucléaire K-27, qui gît toujours, par 33 mètres de fond, en mer de Kara. Dans les mers de Barents et de Kara ont été immergés, énumère Miriam Potter, "cinq
réacteurs de sous-marins et de brise-glaces, une vingtaine de
bateaux dont certains contenaient des matières radioactives, des centaines d'objets contaminés et 17 000 conteneurs de déchets nucléaires". Pour faire bonne mesure, un autre sousmarin, le K-159, y a coulé en 2003. Le site d'Andreeva Bay, dans le nord de la péninsule de Kola, représente, pour Robin des Bois, un "cauchemar". L'Union soviétique y avait installé, dans les années 1960, trois piscines de refroidissement des combustibles usés provenant de sous-marins et de brise-glaces nucléaires. Des fuites se sont produites dans deux d'entre elles, provoquant une très forte contamination. Depuis, des entreposages à sec de 22 000 assemblages de combustibles ont été aménagés, dans des conditions très précaires.




CHUTE DE SATELLITE, CRASH DE BOMBARDIER

Les Américains n'ont pas été en reste. Dans les années 1960, ils ont construit deux petits réacteurs nucléaires de 20 et 10 mégawatts, pour alimenter en électricité des bases militaires, à Fort Greely, en Alaska, et à Camp Century, dans le nordouest du Groenland. Le premier, victime de plusieurs accidents, a contaminé les cours d'eau, et les populations locales font aujourd'hui état de leucémies, malgré les démentis de l'administration américaine. L'exploitation du second aurait laissé dans les glaces "au moins 200 tonnes de
déchets liquides". Les Etats-Unis ont aussi testé le comportement
de radioéléments à Point Hope, dans le nord-ouest de l'Alaska. Ce n'est pas tout. De 1930 à 1962, le Canada a exploité, autour du grand lac de l'Ours, des mines de radium puis d'uranium, une partie de celui-ci étant destiné au projet Manhattan qui a doté les États-Unis de l'arme atomique. Plus de 900 000 tonnes de stériles (déchets miniers) d'uranium ont été laissées sur place, dont 740 000
immergées dans le lac. S'ajoutent les accidents. La chute, en 1978, du satellite espion soviétique Cosmos-954 et de son réacteur nucléaire, dans le nord du Canada, où plus de 120 000 km2 ont été
contaminés par de l'uranium enrichi et des produits de fission. Ou le crash, en 1968, d'un bombardier américain B- 52 transportant des têtes nucléaires, près de Thulé (Groenland), où subsisterait "au moins un kilo de plutonium sur un rayon de 17 km".


 

OPÉRATIONS DE DÉCONTAMINATIONMais l'Arctique ne paie pas seulement la facture du passé. Les activités minières actuelles, de même que les forages pétroliers et gaziers – il y en a plus de 4 000 en Alaska, audessus du cercle polaire –, génèrent des déchets à "radioactivité naturelle renforcée". Des opérations de décontamination ont certes été engagées, notamment à l'initiative du G8 et de pays européens. Mais les zones touchées sont immenses, la pollution disséminée et les crédits insuffisants. "Les gouvernements doivent faire preuve de transparence sur les produits radioactifs qu'ils ont entreposés ou dispersés. Et il faut organiser un suivi radiologique des sédiments, des poissons et des populations", plaide Jacky Bonnemains. En attendant que le fragile Arctique bénéficie, un jour peut-être, d'un statut protecteur comparable à celui de l'Antarctique.

lundi 5 novembre 2012

Désarmement unilatéral ou/et désarmement total ?


« Avant », « ou », « et », « d'abord ».


Désarmement nucléaire unilatéral de la France, désarmement nucléaire total, les deux options sont actuellement, l'une comme l'autre, hors de portée. Tout doit donc passer par l'opinion publique, c'est-à-dire l'action politique.

Doit-on parler de désarmement nucléaire unilatéral de la France avant de parler de désarmement nucléaire total ? Tout dépend de ce à quoi l'on pense si on l'affirme ! S'il s'agit du point de vue où se place un Français qui s'occupe, avant tout, de ce qui le regarde, cela va de soi. S'il s'agit de considérer quelle est la priorité d'une option par rapport à l'autre, dans l'importance des engagements, alors il devient erroné d'établir une hiérarchie, qui ne sera pas la même d'un État à l'autre, et qui ne saurait convaincre la totalité des acteurs de la lutte anti-nucléaire, même en France.

Doit-on parler de désarmement nucléaire unilatéral de la France ou parler de désarmement nucléaire total ? Cela n'a pas grand sens pour un Français qui ne peut, pour agir, ni attendre le renoncement du gouvernement français à la dissuasion, ni compter sur la seule hypothèse d'une signature d'une Convention internationale !

Doit-on parler de désarmement nucléaire unilatéral de la France et parler de désarmement nucléaire total ? Non seulement l'un va dans l'autre, mais nul ne sait quel événement pèsera le plus sur la décision politique conduisant, un jour, à l'engagement unilatéral de la France ou/et à son approbation d'une Convention internationale ! C'est pourquoi la troisième hypothèse, (celle du « et ») est la moins imparfaite.

  Des données qui parlent d'elles-mêmes : la répartition des ogives nucléaires. 
La France est directement concernée mais pas toute seule !

À cela s'ajoute plusieurs considérations de bon sens :
On pèse d'autant plus sur l'opinion publique qu'on est plus nombreux à exprimer la même revendication : abandonner la dissuasion qui n'a plus aucune justification des points de vue militaire, technique, financier et moral. Certains, dont je suis, pensent que jamais il n'y eut de telles justifications, mais c'est toute l'opinion qu'il faut « embarquer » à partir de l'examen actualisé de la situation internationale tout entière.

On ne peut -hélas!- exclure l'hypothèse d'un accident nucléaire majeur, d'ordre civil ou militaire, ou même d'un conflit qui conduirait les États concernés, y compris contre leur gré, à accepter ce qu'actuellement ils refusent : un accord devenu général sous l'égide de l'ONU.

• Agir, dans chaque État, dans l'État où l'on vit, doté ou non d'armes nucléaires, pour pousser au renoncement à ces armes, est une urgence citoyenne et planétaire qui élimine l'hypothèse de s'en tenir seulement à une action nationale. ( Les peuples des États non dotés ne sont-ils pas concernés, eux aussi, et n'ont-ils rien à dire ? )

On ne peut préjuger que le désarmement nucléaire unilatéral de la France serait plus efficace et plus vite obtenu qu'un désarmement nucléaire total, ni l'inverse ! Chacun peut fournir son pronostic, mais rien n'est sûr. Rien n'est donc irréaliste ou réaliste (convaincre l'État français ou faire peser la majorité des États du monde sur la décision, via l'ONU). Il faut pourtant agir car le risque croît.

Je maintiens donc qu'il ne faut pas opposer ou risquer d'opposer ceux qui veulent, et l'un et l'autre, des désarmements nucléaires, unilatéral en France, et général partout ailleurs, dans chaque pays ainsi que dans les instances internationales officielles ou non. 


Désarmement nucléaire unilatéral de la France d'abord, pour nous Français, certes oui, mais désarmement nucléaire unilatéral de la France, seul exigé, non !  

Désarmement nucléaire unilatéral de la France et désarmement nucléaire total sont comme l'endroit et l'envers d'une même médaille, pour nous citoyens français.


Jean-Pierre Dacheux