vendredi 26 juillet 2013

Nucléaire : c'est là qu'ça se corse !

Tchernobyl : au paradis du nucléaire français, Marisol Touraine et le gouvernement restent sur leur nuage radioactif

Paul Giacobbi, président du conseil exécutif de Corse et député de la Haute-Corse, a évoqué mardi devant l'Assemblée nationale, lors des questions au Gouvernement l'enquête épidémiologique effectuée à l'initiative de la CTC après le passage du nuage de Tchernobyl en Corse. Son espoir d'avoir été entendu a vite été tempéré par Marisol Touraine, ministre de la Santé !

Michèle Rivasi, députée européenne.

25 juil 2013

En séance à l’Assemblée nationale mardi, la ministre de la Santé Marisol Touraine a jugé non concluante une récente étude italienne qui fait état d’une forte augmentation des maladies de la thyroïde, dont des cancers, en Corse après le passage du nuage radioactif de Tchernobyl en 1986. Le lendemain, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) lui emboîtait le pas, jugeant que les données de base utilisées et les méthodes d’analyses paraissent approximatives et mal décrites.
Le déni continue donc 27 ans après la catastrophe de Tchernobyl, une position jugée irresponsable par l’eurodéputée Michèle RIVASI, fondatrice de la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité), qui soutient depuis le début cette étude effectuée sur la base de 14.000 dossiers médicaux archivés et plus particulièrement sur 5.500 dossiers « complets » concernant des patients ayant consulté avant et après l’accident de la centrale nucléaire ukrainienne du 26 avril 1986.

« Ce qui m’étonne le plus, c’est la rapidité et l’aplomb avec lesquels l’IRSN rejette une telle étude, confiée pourtant à une équipe scientifique aussi crédible que compétente, suite à un appel d’offres européen. Les données utilisées sont suffisantes et crédibles. Le vrai problème est que l’IRSN a toujours refusé de reconnaître la dangerosité des faibles doses d’exposition à la radioactivité, s’entêtant – comme il vient de le répéter – à ne juger cette étude qu’en l’état actuel des connaissances sur les effets des expositions aux rayonnements ionisants.Reconnaître les dangers des faibles doses ce serait remettre en cause l’ensemble des normes de radioprotection et donc condamner définitivement le nucléaire pour raisons sanitaires »

« Actuellement au Parlement européen, nous débattons de la future directive européenne sur la radioprotection, une occasion inédite de remettre en cause les normes actuelles pour les améliorer, ce à quoi je m’emploie. Je vous le dis franchement, d’un point de vue cynique nous conservons de telles normes pour éviter de payer trop cher en indemnisations en cas d’accident nucléaire. C’est le seul moyen d’éviter un krach économique complet suite à une catastrophe nucléaire majeure. Bref, une telle attitude démontre que l’on s’attend donc à avoir un accident, ce qui est inacceptable pour tout un chacun »
 .
« Cette analyse de l’IRSN contredit pourtant des études officielles de l’Institut national de veille sanitaire (INVS), qui ont démontré que l’incidence des cancers de la thyroïde en Corse est parmi les plus élevée de France…puisque la Corse a été la région la plus affectée par les retombées radioactives. CQFD ».

« Le syndrome de Tchernobyl semble toucher les gouvernements successifs, empêtrés dans une dépendance au nucléaire qu’ils n’ont su résoudre. Avec cette étude, la gauche avait enfin l’opportunité de reconnaître un des plus graves mensonges de la Vème République, je suis extrêmement déçue ».

« Depuis des années les victimes de Tchernobyl attendent une reconnaissance officielle des maladies qui les affectent. Je ne peux que m’indigner d’une telle irresponsabilité pour protéger les intérêts de l’industrie nucléaire: au final, le mensonge initial oblige à sa répétition pour ne pas mettre à mal la crédibilité de l’Etat en matière de responsabilité nucléaire. Le seul moyen de sortir d’un tel cercle vicieux est de sortir du nucléaire ».

vendredi 12 juillet 2013

Fin de la Finlande..?

  POUR L'ÉTERNITÉ...

 

Des milliers de tonnes de déchets radioactifs vont être enterrées dans une cavité, qui devra rester inviolée pendant 100 000 ans. Un défi insensé et risqué.



A l’ouest de la Finlande, sur la presqu’île d’Olkiluoto, des ouvriers s’affairent à creuser un immense trou de 450 mètres de profondeur, parcouru par cinq kilomètres de route.
Lorsqu’il sera terminé, en 2020, l’industrie nucléaire finlandaise commencera alors à y enterrer des milliers de tonnes de déchets radioactifs. Et quand cette besogne sera à son tour achevée, 100 ans plus tard, la cavité sera scellée et devra rester inviolée pendant 100 000 ans.
Un défi insensé, plein de risques, qui dépasse techniquement et philosophiquement tout ce que l’homme a pu entreprendre jusque-là.
La route est longue, étroite, et sa platitude n’a d’égale que sa monotonie. Elle serpente dans la région du Satakunta, à travers des bordées de bouleaux et de sapins, et débouche tout droit sur le Golfe de Botnie, cette étendue d’eau qui sépare la Finlande de la Suède.
Avant de bifurquer sur la gauche, pour rejoindre la route nationale 8, puis encore sur la droite, quelques kilomètres plus loin, en direction de la presqu’île d’Olkiluoto, on traverse la bourgade d’Eurajoki.

« Onkalo », « la cave » en finnois

Eurajoki est une coquille sans charme particulier, Eurajoki transpire l’ennui, mais Eurajoki est une commune prospère. Comme tous ceux pour qui ce nom évoque quelque chose, je n’aurais jamais entendu parler de ce petit bled grisâtre du sud-ouest de la Finlande s’il n’était pas la municipalité qui chapeaute le complexe nucléaire d’Olkiluoto.
Avec ses deux réacteurs en fonction depuis la fin des années 70, et l’interminable construction de son EPR – le fameux réacteur pressurisé européen d’Areva –, cette presqu’île constitue l’un des centres névralgiques de la politique énergétique de la Finlande.
Mais ce qui en fait un endroit à part sur le globe, c’est son tombeau nucléaire, construit par l’entreprise Posiva. L’endroit a été baptisé « Onkalo », « la cave » en finnois. Des bataillons d’ouvriers étrangers, venus de toute l’Europe, y ont creusé un immense trou à même la roche.
Selon le plan établi, à partir de 2020, l’industrie nucléaire finlandaise y stockera tous les déchets produits par ses centrales depuis 1996. L’opération de stockage est prévue pour durer 100 ans. Un siècle durant lequel, chaque semaine, un funeste cortège de camions chargés de détritus à la toxicité inégalable empruntera les cinq kilomètres de route souterraine qui mènent au fond de la cave.

Ouverture interdite pendant 100 000 ans

Ces milliers de tonnes de déchets seront alors réparties dans des trous creusés à l’intérieur d’une interminable galerie de tunnels. Puis méticuleusement, les unes après les autres, ces cavités seront rebouchées.
Enfin, quand cent ans plus tard, en 2120, les 4 500 orifices imaginés seront repus du matériel mortifère, alors on refermera cet édifice titanesque et on devra prétendre qu’il n’a jamais existé.
C’est là que se profile le paradoxe qui fait toute la folie d’Onkalo. Une fois la grotte obstruée, il s’agira de s’assurer que personne n’ait l’idée saugrenue d’éventrer la roche de nouveau.
Après tout, si nos prédécesseurs se sont entêtés à ouvrir le tombeau égyptien de Toutânkhamon – un sanctuaire qui aurait dû rester inviolé pour l’éternité –, quel message pourrait bien être assez fort pour dissuader les générations futures d’explorer à leur tour ce qui sera devenu un vestige du passé, d’une autre civilisation peut-être ?

Une aberration qui sied à notre espèce

Les résidus radioactifs d’uranium et de plutonium dont il est question devront demeurer sous terre pendant 100 000 ans. Pas 100 ans. Pas 1 000 ans. Ici, les esprits narquois pourraient alors avancer qu’à 2 000 ans près, on est tout à fait en mal de certifier si un type répondant au nom de Jésus Christ a réellement existé, quand bien même quatre autres personnages tout aussi obscurs auraient chacun signé un ouvrage pour perpétuer sa parole et ses actes.
Onkalo est donc l’histoire d’un trou creusé par notre espèce, une cavité conçue à la seule fin de recevoir les restes d’un procédé technologique pas complètement maîtrisé.
Une fable universelle de l’homme censé inventer un message pour expliquer à son prochain qu’il ne faut pas ouvrir un cercueil dont il lui confie la charge, sans avoir l’assurance que ce prochain soit en mesure de décrypter ledit message.
En d’autres mots, une aberration qui a pourtant du sens, une mécanique qui sied parfaitement à notre espèce. « Agissons d’abord, on réfléchira plus tard », n’est jamais qu’une maxime qui nous ressemble bien.

http://fr.news.yahoo.com/onkalo-voyage-tombeau-nucl%C3%A9aire-finlandais-075929471.html


Loïc H. Rechi | Journaliste et Vincent Desailly | Photographe - Editeur sur RUE 89