samedi 19 mai 2012

Pour une seule lutte antinucléaire.

 

Jacques Fath, responsable du secteur relations internationales du PCF, publie, dans le numéro de mars 2012 de La Revue du Projet, un article que reprend Médiapart, le 18 mai 2012. " Comment une France de gauche peut-elle agir pour le désarmement " demande-t-il ?

Si c'est ainsi que s'ouvre le débat sur la fin du nucléaire militaire : c'est raté ! On trouve, en effet sous la plume de ce responsable du Front de gauche, membre du Parti communiste, deux affirmations parfaitement contradictoires.

On lit d'abord :  "On ne peut sérieusement penser les conditions de la sécurité internationale et le besoin de paix sans poser la question du désarmement  pour tous les types d'armes. Cette approche signifie aussi un changement de paradigme. La sécurité par la puissance et par la dissuasion... Cela reste une politique de force". Et puis ensuite : " Il n'est pas question de désarmer unilatéralement, ce qui n'aurait guère de sens dans le monde actuel et pourrait même se révéler dangereux."

Ne pouvant passer pour un adepte du seul désarmement nucléaire unilatéral de la France, il m'est aisé de dénoncer ce refus du désarmement nucléaire unilatéral de la France et ce retour à une conception étatiste et nationaliste de la défense. Jacques Fath ne va-t-il pas jusqu'à terminer son article par le paragraphe suivant :  " Les activités de défense-sécurité comme les industries d'armement doivent relever de la souveraineté nationale et du domaine public, par la nationalisation lorsque c'est nécessaire. Elles doivent produire ce qui est utile à une défense nationale qui s'inscrive dans la nouvelle politique. L'importance relative de ces industries doit diminuer réellement au fur et à mesure des progrès du désarmement. L'emploi peut être conservé et développé dans des processus de reconversion et dans une économie de croissance. Le désarmement est possible dans une véritable alternative politique en France. " Autrement dit, si la croissance l'exige, on continuera, en France, de produire des armes dont on espère seulement qu'elles diminueront "au fur et à mesure des progrès du désarmement ".

Où est le changement de paradigme ? Si c'est là le tout de "l'action de la France de gauche", c'est un peu maigrelet ! Cette modeste contribution à un moins de dépenses et de production d'armes de mort est tout à fait conforme à la politique sans ambition que n'a cessé de développer le PCF dans ce domaine, sans doute pour avoir encore, en lui, les traces des éléments de doctrine qui datent du temps de la guerre froide et de son soutien à l'URSS !

Je soutiens, au contraire, que le changement de paradigme consisterait à avoir deux fers au feu : la proposition de mise en œuvre effective d'une convention internationale pour le désarmement nucléaire en s'appuyant sur le refus massif de la plupart des États de l'ONU, d'une part, et l'engagement de la France, unilatéralement, dans des processus d'abandon définitif de la dissuasion nucléaire, laquelle ne protège plus personne, d'autre part.


Qu'est-ce qu'une politique qui recommande aux autres États de faire ce que soit même on ne veut ni envisager ni engager ? On voit ce qu'il en est pour tenter d'interdire à l'Iran de se doter d'un armement nucléaire : pour l'empêcher de disposer de "la" Bombe, certains États sont prêts à... le bombarder. Sortir de cette logique infernale qui peut emporter l'humanité dans un drame indescriptible est une priorité absolue, comme l'a démontré, récemment, Günter Grass.

Les acteurs des luttes antinucléaires, au lieu de se disqualifier les uns les autres, feraient mieux de se reconnaître comme engagés ensemble dans une action complexe, de longue durée, où les fins et les moyens ont à être examinées simultanément.

Que ceux qui estiment que toute citoyenneté qui se respecte commence par elle-même continuent d'exiger que la France donne l'exemple et commence la première, comme peuvent le faire, dans leur île, les Britanniques qui, eux aussi, ont à sortir toute l'Europe de ce péril continental, dès lors que les armements nucléaires ne peuvent plus qu'attirer le terrorisme.

Que ceux qui veulent une négociation internationale, efficace et exigeante, qui conduise à l'abandon généralisé d'armements dont la prolifération ne peut conduire, tôt ou tard, qu'à un conflit sans précédent et d'une horreur sans égale, ne renoncent pas, sous prétexte que, jusqu'alors, l'impuissance et la médiocrité l'ont emporté dans toutes les conférences internationales !

Au moment où la France change de majorité, sans rien attendre d'un gouvernement enfermé dans des logiques militaires à peine entamées par le temps et l'histoire, les citoyens ont à crier leur volonté de "sauver leur peau" et celle de tous leurs frères en humanité ! Oui, il est question de désarmer unilatéralement, comme il est question de désarmer planétairement.  Le monde ne bougera pas sans la France. La France ne fera pas seule bouger le monde.


Jean-Pierre Dacheux


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